Roger dans le bois perdu

Gouville sur mer au presbytère de bois-roger,
dans le département de la manche,
c’est un beau bâtiment en pierre,
imposant un peu comme ceux que l’on trouve en Bretagne.
J’ai commencé une nouvelle planche, j’ai fait trois paysages de montagnes, sur cette planche verticale avec des découpes sur les côtés. Dans deux retraits formant comme des niches, j’ai esquissé dans chacune, une petite tête d’oiseau. Les montagnes sont constituées d’une multitude de petits points serrés, des formes simples et des chemins en créant des espaces vides de points.
Le mardi, j’ai attaqué la peinture, j’ai beaucoup tâtonné, essayant de nombreux coloris, rouge, bleu, blanc, sans jamais trouver la formule qui me réjouisse, j’ai fini par tout effacer.
Je me suis aperçu, je le savais déjà et mon entourage aussi, que la frustration née de cette impossibilité à trouver le chemin me rendait vraiment de sale humeur, mon fils Thomas qui déménageait ses meubles et affaires de la maison en a fait les frais. Je suis vraiment pénible pendant ces moments de doute.
Juste après son déménagement auquel j’ai participé avec toute notre petite famille, j’ai repris une idée que j’avais eu quelques jours avant : écrire sur la planche des mots puis en écrire d’autres en les faisant se chevaucher, se recouvrir. Après dans cet entre-las de lettres, de signes totalement bordéliques, même si je ne suis pas sûr que les bordels étaient bordéliques mais ceci est une autre histoire, je place des petits traits de gouache blanche qui participent à faire ressortir les traits bruns de la pyrogravure. Le résultat, bien que non définitif, j’ai encore beaucoup de surfaces à remplir comme cela, me semble encourageant.
Dans le couloir, à l’étage du presbytère, nous avons vu sur le cimetière et l’église. Permanence, impermanence.
Ce travail sur les entre-las de lettres n’est peut-être qu’une étape, j’aime le côté incontrôlé du résultat, il est possible que dans quelques temps, je souhaite redonner de l’ordre à tout ça, peut-être avant qu’il ne soit temps pour moi aussi de rejoindre le cimetière. En écoutant France-cul, je pique des mots au passage, je les inscris directement sur la planche puis je les recouvre par d’autres au fil de l’écoute. Il y en a quelques uns que je n’ai pas recouverts pour créer quelques variations, je cercle, entoure les mots par un trait sombre au pyrograveur, comme il y a beaucoup de mots, de groupes de mots, cela crée un réseau, comme des canaux.
Gigi et Stéphane préparent la bouffe à l’étage en dessous, je les entends depuis la chambre, les maisons anciennes avec leurs planchers en bois sont toujours très sonores.
Cet après-midi, nous partons faire une partie de pêche à pied, à Gouville-plage.
J’ai emmené une vieille épuisette que j’ai retrouvée dans le garage de mes parents, j’ai réparé un peu le filet qui ne tenait plus au cadre métallique.
Devant la fenêtre de l’autre côté de la maison, des champs entourés de haies bocagères avec de l’herbe bien verte et grasse, gorgées d’eau, et des arbres, des pommiers, nous sommes en Normandie.
Les cloches de l’église sonnent, je croyais au début que c’était les douze coups de midi, mais là ça continue, je ne sais pas ce qu’elles célèbrent.
Les autres doivent sûrement me trouver bizarre,
à rester dans la chambre
à griffonner ce carnet
plutôt que de me joindre à eux,
mais c’est ainsi, je n’ai jamais eu goût au troupeau, la solitude me plaît, je tiens ça de mon père.

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